L'ORGANISATION
DES PROVINCES SOUS AUGUSTE
A
partir du IIIe s. av. J.-C, après avoir acquis la maîtrise de
l'Italie, Rome est parti à la conquête de nouvelles terres et quand
Octavien accède, après Actium, à la tête de l'état romain.
L'empire s'étend sur presque tout le contour méditerranéen, puis
après la bataille d'Alexandrie, il va encore lui adjoindre l'Egypte.
Sous la République, c'est exclusivement le Séant qui a la
responsabilité de cet empire. Avec Octavien, une nouvelle
répartition des responsabilités est opéré depuis le 13 janvier,
c'est alors qu'Octavien remet au Sénat et au peuple romain, les
provinces dont il a eu la responsabilité en tant que triumvir. Il a
bénéficié d'un imperium qui se situe dans la ligne des
commandements extraordinaires de la République, le triumvir permet
aux trois hommes de se partager l'empire et de s'occuper de ses
territoires sans consulter le Sénat et indépendamment des autres.
En effectuant cette restitutio en 27, Octavien marque le retour à la
tradition républicaine et la fin d'une période d'exception et donc
la possibilité à nouveau pour le Sénat de diriger comme avant. La
Curie, pourtant au cours de la même séance, va effectuer un nouveau
partage et c'est de cela que traitent Dion Cassius et Strabon.
Dion
Cassius est né entre 155 et 160 à Nicée, dans la partie orientale
de l'empire. C'est un haut-fonctionnaire de langue et de culture
grecque. Il a la citoyenneté romaine et devient sénateur sous
Commode. Il est choisi deux fois consul sous la monarchie sévérienne.
Il écrit son Histoire Romaine au début du IIIe s. et s'y montre un
ardent défenseur du modèle impérial.
Strabon,
lui aussi, est de langue et culture grecque. C'est un émient
géographe à qui l'on doit un ouvrage intitulé Etudes historiques.
Il a l'avantage d'être contemporain des faits qu'il rapporte
puisqu'il est né en -58 et décède aux alentours de 20. C'est un
voyageyr, il se rend un temps à Rome et donc se familiarise avec les
pratiques romaines. Pour lui, la géographie est une science des plus
utiles pour les hommes d'état dans la mesure où une bonne
administration des territoires correspond à une bonne gouvernance.
Comment
Auguste restitue-t-il les provinces ?
I)
Une volonté de se placer dans la continuité de la res publica
Dion
Cassius affirme qu'Octavien, s'il a consenti à s'occuper des
affaires publiques, dit qu'il ne gouverne pas seul les provinces et
qu'il ne les garde pas tout le temps (l.2-4). L'intention est
évidente : il n'entend pas apparaître comme celui qui
monopolise le pouvoir ni comme celui qui ignore les institutions
traditionnelles., il veut marquer son respect pour le Sénat. D'une
certaine manière, il dit qu'il va collaborer avec la Curie dans la
gestion des provinces et c'est indispensable de procéder ainsi dans
le cadre du respect du SPQR ????? (aucune décision ne peut être
prise sans l'accord du Sénat et des comices). Quant à l'idée qu'il
ne les garderait pas tout le temps, relève de l'idée que les
charges que l'on se voit confiées correspondent à des missions. Une
fois la mission achevée, on l'abandonne. Si le Sénat accorde à
Octavien la responsabilité de plusieurs provinces et ce pour une
durée limitée de 10 ans, cela n' a rien de choquant car elle est
prise via le biais d'une loi et car on a déjà vu au moins une fois
quelqu'un gérer plusieurs provinces en même temps : Pompée.
On a un mandat du peuple sur avis du Sénat, donc théoriquement ce
n'est pas un partage contrairement à ce que dit Dion Cassius, qui a
un regard de grec sur une réalité romaine. De plus, il n'est pas
contemporain donc certaines subtilités ne l'intéresent plus.
Il
y a une apparente collaboration qui se met en place entre le Sénat
et Auguste lui permettant de gérer, dans le cadre de son mandat, le
gouvernement des provinces d'Espagne, de Gaule puis de la Syrie et de
l'Egypte. Par ailleurs, le Sénat garde la responsabilité de 10
provinces. Cette répartition évolue avec le temps. Par exemple,
Auguste a eu autorité sur Chypre, il va l'administrer mais cette
province a été rétrocédée au Sénat dès -22 de même que la
Bétique en -16/-13. Les limites des provinces peuvent varier. Par la
suite, le nombre des provinces confiées au Sénat reste relativement
simples. En théorie, les auteurs expliquent que les provinces les
plus riches (les plus pacifiées) sont sénatoriales, Strabon montre
qu'on les nomme provinces publiques et non provinces sénatoriales :
elles ont été conquises assez tôt par les romains donc il n'y a
plus de contestations. Pour les provinces césariennes correspondent
aux régions où le risque de troubles est plus importants., soit
parce qu'elles sont limitrophes avec des peuples barbares ou parce
que les risques de sédition sont importants. Le fait que ces
territoires sont instables justifient qu'on leur assigne une
personnalité précisément mandatée et munie de pouvoirs
extraordinaires.
II)
Les moyens de dominer les provinces de l'empire
L'empereur,
pas plus que le Sénat, n'administre pas directement les provinces
dont ils ont la charge. Dans les provinces impériales (ou
césariennes), le princeps nomme, pour le représenter, des légats*
que l'on appelle les légats d'Auguste. Il se base sur le modèle de
Pompée qui a gouverné à partir de Rome les trois provinces
espagnoles entre 54 et 59 en y envoyant trois légats. Les légats
choisis par Auguste sont toujours choisis parmi les sénateurs, dans
le rang des anciens préteurs, que l'on nomma les légats d'Auguste
propréteurs de rang prétorien, ou parmi les anciens consuls dans ce
cas ce sont légats d'Auguste propréteurs de rang consulaire. Il y a
encore d'autres provinces impériales, celles où l'enjeu stratégique
est moins grand, et donc celles où le nombre de légions en place
est moins important. Elles sont gouvernées par de simples chevaliers
qui eux aussi sont nommés par le princeps. Ils portent le nom de
procurateur* ou préfet. En général, le préfet dispose de plus de
troupes qu'un procurateur.
Pour
les provinces sénatoriales, elles sont dirigées par des gouverneurs
qui sont systématiquement sénateurs, soit d'anciens préteurs, soit
d'anciens consuls. Les provinces les plus prestigieuses sont celles
dites consulaires : province d'Afrique et celle d'Asie. Les
autres sont dites prétoriennes. Les pouvoirs sont égaux qu'ils
soient consuls ou préteurs, la seule différence se situe au niveau
des attributs du pouvoir, lors de leurs apparitions publiques des
proconsuls d'Afrique et d'Asie. Ils sont précédés par 12 licteurs*
qui portent des faisceaux (attribut du pouvoir qui symbolisent
l'autorité des pro-magistrats), ils sont chargés de l'escorte qui
marque la dignité autour de la foule. Les autres gouverneurs n'ont
que 6 licteurs. Un magistrat ne peut normalement pas obtenir une
province avant un délai de 5 ans après sa sortie de charge.
III)
Un empire à la discrétion du prince
Cette
fiction de la restitution des provinces au Sénat et au peuple romain
le 13 janvier 27 ainsi que celle du mandat d'Auguste. Pour les
contemporains, l'idée d'une répartition des provinces entre le
Sénat et le princeps paraît très vite évidente. Strabon en fourni
la preuve par ces propos, il écrit que c'est bien Auguste qui
« divisa l'empire en deux parts » (l.3 + 9). Dion Cassius
écrit (l.4-7) qu'Octavien s'est réservé des provinces où se
trouvent le plus grand nombre de légions. La fiction du mandat est
mis à jour quand Dion Cassius écrit « c'était en apparence…
entretiendrait les soldats » (l.7-10). Non seulement le Sénat
n' a pas son mot à dire au moment de l'attribution des provinces
mais plus cela a permis de donner à Auguste la maîtrise des forces
armées de l'empire qui lui confère une puissance inégalée et un
moyen de pression redoutable en cas de besoin. Le fait qu'il dispose
de la très grande majorité des troupes en cas de crises graves, il
apparaît comme le recours le plus évident. La défense des
frontières représente une tâche sans fin et cela à un avantage
indiscutable pour Auguste car ça à l'avantage de pouvoir justifier
le renouvellement régulier de ses pouvoirs extraordinaires.
Le
Sénat est épuré peu avant janvier 27, après les guerres civiles,
il a été nécessaire de procéder à une révision de la liste des
sénateurs. Officiellement, il s'agit de rendre tout son lustre à la
Curie. Durant les guerres civiles, le nombre de sénateurs a augmenté
et les différents triumvirs sont soucieux d'y faire entrer des
hommes qui leur sont fidèles. En revoyant la liste des sénateurs en
28, Octavien redonne quelques crédibilités à ce Sénat mais en
même temps, ceux qui vont demeurer au Sénat lui seront
reconnaissant, ce qui va rendre les initiatives futures d'Auguste
plus simples même s'il ne faut pas s'imaginer qu'il n'a rencontré
aucune résistance au Sénat.
Les
auteurs ne précisent pas si l'est arrivé que le princeps nomme à
la tête des provinces sénatoriales des pro-magistrats de son choix.
Il ne faut pas imaginer qu'il y a une frontière étanche entre les
provinces impériales et sénatoriales. Le princeps intervient
régulièrement dans les provinces dépendantes du Sénat et ce en
vertu de son imperium infinitum qui lui permet depuis -23
d'intervenir dans toutes les provinces. En raison de son auctoritas,
ce sont ses décisions qui prévales.
Le
pouvoir du princeps dans l'empire est d'autant plus grand qu'il a
aussi autorité sur les états vassaux, états conquis par les
romains mais où, plutôt que de les annexer et d'en faire des
provinces, il a mis des rois servant d'états tampons avec d'autres
peuples. Ce système a l'avantage de garantir l'influence romaine sur
des territoires éloignés tout en épargnant à Rome les soucis
d'une administration directe.
Le
partage des provinces en -27 s'est inscrit dans une stratégique plus
large, connue sous le nom de Res Publica Restituta. Il s'agit
de montrer que l'état est restauré et que les piliers du système
ont retrouvé toutes leur prérogatives. C'est pour cette raison
qu'Octavien Auguste souhaite paraître être mandaté par eux pour
assurer l'administration de multiples provinces par l'intermédiaire
de légats. Des précédents républicains l'autorisent à gouverner
des provinces à distance. Son imperium proconsulaire est prolongé
une fois les dix années initiales du mandat écoulées, la nature de
sa mission de protéger les frontières du danger barbare, rend cette
prolongation très facile. Le fait que les provinces dont il a la
charge ont été si nombreuses et qu'elles disposent de la plupart
des légions donnant au princeps une prééminence dans l'état
romain. L'imperium infinitum ne fait que confirmer cette prééminence,
mais en définitif, peu importe que les apparences sont sauves dans
la mesure où le principat est parvenu à se voiler progressivement
sous les oripeaux de la République.
(Légats
d'Auguste nommés alors que les proconsuls sont tirés au sort et
nommés pour un an dans leur provinces, les légats restent environ
2-3 ans, c'est le prince qui y met fin.)
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