mardi 3 mars 2015

TD ancienne : 3- Charges et honneurs confédérés à Auguste

CHARGES ET HONNEURS CONFERES A AUGUSTE

En janvier -27, Octavien remet les pouvoirs qu'il a depuis qu'il a été nommé triumvir rei publicae constituendae (= les trois hommes chargés de restaurer l'état) au Sénat. Il s'agit d'une forme de dictature, sans le nom, dans la mesure où celle de César laisse de mauvais souvenirs, qui est créée pour emplir une mission spécifique : restaurer l'état romain. Cette magistrature doit s'interrompre, légalement elle a trouvé un terme dès décembre -33, il est nommé triumvir pour 5 ans puis cela est renouvelé. Octavien va quand même conserver ses prérogatives et à partir de 31, il va être consul chaque année. Les séances du Sénat de janvier -27 restent fameuses dans la mesure où elles marquent la fin d'une période d'exception. Remettant ses pouvoirs aux sénateurs, Octavien reconnaît officiellement que l'état romain est rétabli. Pourtant, à cette occasion et dans les années qui suivent, Octavien devenu Auguste va cumuler des pouvoirs qui lui donne une prééminence incontestable dans l'état jusqu'à se mort. Ces pouvoirs sont évoqués dans les Res Gestae Divi Augusti en particulier dans les chapitres 4 à 8. Il s'agit d'un testament politique qui est lu devant le Sénat par Drusus (fils de Tibère) après le décès d'Auguste. Il est rédigé par le défunt lui-même sans doute peu avant sa mort. Il doit être gravé et déposé devant le mausolée d'Auguste à Rome et on en a retrouvé plusieurs copies gravées dans le bronze en Asie Mineure. Sa particularité est d'avoir une fonction constitutionnelle. Il s'agit de glorifier l'oeuvre d'Auguste mais aussi de montrer à ses successeurs comment ils doivent gérer l'empire. Il va même s'interroger sur la nature réelle du pouvoir Augustéen.
Le pouvoir augustéen va-t-il constitué une simple restauration de la res publica sur le modèle du régime né en -509 ou est ce que ça a été une innovation masquée d'une monarchie à façade républicaine ?

I) Le respect, du moins apparent, de la res publica

Rappel dès le ch.7 qu'il a été triumvir chargé de réorganiser l'état : c'est bien la preuve que cette magistrature est légale. L'initiative est à l'origine privée mais est validée par une loi (= lex titia). En faisant allusion à cette charge, Auguste entend rappeler qu'il a agi officiellement en tant que restaurateur de l'état. On ne peut pas l'assimiler à un ambitieux qui a tenté un coup d'état.
(possibilité de citer le ch.1, Auguste affirme que dès -44, il agit, certes en simple particulier en levant une armée mais il le fait pour libérer la res publica qui était alors opprimer par une faction toujours dans l'intérêt de l'état.)
La remise des pouvoirs en janvier -27 est là aussi pour rappeler le caractère désintéressé de son geste

A en croire les Res Gestae, les pouvoirs d'Auguste sont traditionnels : consul* (= magistrature suprême de la République), Princeps senatus* (= prince du sénat, titre très prestigieux qui donne une aura particulière et qui existe sous la République, sénateur le élevé en dignité : c'est le 1er a parlé lors des séances, souvent rallié par les autres sénateurs). Il a la volonté de se placer dans une stricte continuité républicaine et il rappelle le rôle central du Sénat dans les institutions romaines.

Auguste, à un certain moment, refuse un certain nombre de pouvoirs exceptionnels donnés par le peuple romain dans une période d'angoisse car cela s'écartait un peu trop de la tradition républicaine. Refus de la censure (= recenser le nombre de citoyens, d'évaluer leur fortune et de dresser les listes des chevaliers et sénateurs), consulat perpétuel (contre le principe de l'annualité traditionnelle des magistratures). Il a été consul de -31 à -22 sans discontinuité, quand Rome et l’Italie sont frappées par une épidémie de peste qui était précédée par de très violents orages et de fortes inondations, pendant l'hiver -23 à -22 provoquant une crue du Tibre détruisant les réserves de blé des greniers voisins du fleuve. Les bras dans les campagnes voisines commencent à manquer à cause de la peste. La disette éclate et on voit la foule assiéger le Sénat décidé alors à contraindre la Curie à céder la dictature pour ne pas mécontenter l'aristocratie et rester dans la loi ( dictature interdite par une loi en -44 après la mort de César). En revanche, il accepte d'endosser la responsabilité de l'approvisionnement en blé. Il va s'empresser d'envoyer à ses frais des navires en Égypte (= greniers à blé de l'empire)

A travers ce refus de magistratures extraordinaires et l'acceptation de plusieurs missions temporaires, Auguste souhaite se présenter comme un recours dans l'état et non comme un magistrat permanent : on y fait appel en cas de situations délicates en raison de ses compétences particulières mais le reste du temps, il veut montrer que l'état continue de fonctionner normalement comme avant la guerre civile.

II) Les fondements juridiques du Principat

Auguste se montre très respectueux de la légalité républicaine mais cela est beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît. En effet, il se présente en recours mais à deux reprises, il évoque la puissance tribunicienne * faisant de lui une personnalité incontournable de la vie politique romaine.
Les collègues du prince = personnes qui comme Agrippa ou Tibère sont pressentis pour être les héritiers d'Auguste à la tête de l'empire.
+ imperium* (honneurs reçus pour les victoires)
= pouvoir permanent

III) Un pouvoir de nature charismatique

Auguste affirme dans les Res Gestae n'avoir jamais eu plus de pouvoir qu'aucun de ses collègues, quand il l'emporte sur ses collègues magistrats, c'est parce qu'il l'emporte sur son auctoritas soit un pouvoir de nature charismatique entraînant une confiance absolue. Cette auctoritas est forgée par ses victoires militaires qui lui valent un certain nombre d'honneurs comme le triomphe*, qui renforcent cette nature charismatique et le placent au-dessus d'un simple mortel.

Le triomphe fait de lui une personnalité hors norme, rarement décerné. C'est une cérémonie de caractère militaire et religieux : action de grâce (cérémonie destinée à marquer la reconnaissance à l'égard d'un ou des Dieux) décerné à un général victorieux après avoir été acclamé imperator par ses soldats sur le champs de bataille après une victoire décisive. Il peut alors franchir avec son armée la pomérium (limite sacrée de Rome) et se rendre au Capitole pour remercier Jupiter de sa protection. Présence d'un butin de guerre, des taureaux pour le sacrifice, les captifs et l'armée défilent. Évocation des ovations* (= triomphe sauf qu'il est à cheval et non en char).

Par ailleurs, la nature charismatique du pouvoir est aussi due au Grand Pontificat* et les 15 hommes chargés des affaires sacrées* qui contribuent à lui donner une prééminence dans l'état.
Confrérie des frères Arvales, créé par Romulus, qui se consacrent au culte de Dea Dia (déesse mineure protectrice des champs), culte tombé en désuétude et qu'Auguste remet à l'honneur. Cela est censé symboliser son attachement à la tradition.

L'éclat de ces honneurs et l'exercice des magistratures contribuent à forger l'aucoritas d'Auguste et justifie son propos à la fin du ch.8. Dans ce chapitre, il précise que, soucieux de la tradition, il a fait des lois qui remettent en honneur les exemples des prestigieux ancêtres, ceux que l'on dénomme les « Vieux romains », ceux qui, par vertus ont fait de Rome une puissance à même de diriger tout le pourtour méditerranéen. Dans la même logique et au nom de la nature charismatique de son pouvoir, auguste se présente lui-même à la postérité comme un exemple à imiter.



Conclusion

Les Res Gestae disent beaucoup de choses sur les pouvoirs dont disposés Auguste même si certaines choses sont tues de manière à préserver la façade républicaine du régime. Elles ne laissent pas beaucoup de doute sur l'étendue de ses pouvoirs mais ils sont toujours présentés comme ayant été légalement obtenus et toujours, il est suggéré qu'Auguste en a usé avec modération, il a même refusé de voir sa puissance encore accrue pour rester dans une certaine tradition, au moins en apparence, ce qui ne l'a pas empêcher d’accepter des missions temporaires .

Les Res Gestae prennent le parti de masquer une réalité qui est celle d'un pouvoir monarchique sanctionnant la prééminence dans l'état d'un homme seul avec le pouvoir global. Auguste va accentuer la dimension monarchique.

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